La récente augmentation du taux directeur de 5 % à 10 % au Burundi suscite des préoccupations quant à ses répercussions sur les consommateurs et producteurs du pays. Le président de l’Association des Banques et Établissements Financiers du Burundi (ABEF), Guy Ghislain Ntwenguye, souligne que les banques commerciales sont dorénavant contraintes d’ajuster les taux d’intérêts, ce qui complique l’accès au crédit pour le citoyen moyen. Cette évolution soulève des interrogations sur la fiabilité du système bancaire centralisé actuel.
Contextualisation et antécédents
Le contexte financier préexistant était marqué par une tendance à la hausse des taux d’intérêt des banques commerciales, comme l’a souligné le travail mené en 2021 par les chercheurs de la BRB, Micheline Kwizera et Jean Claude Barikunzira. Leur analyse sur la dernière décennie révèle un taux d’intérêt relativement élevé, atteignant une moyenne de 15 % jusqu’en 2021, malgré des taux de rémunération des dépôts relativement faibles à cette époque (4 % en moyenne). Vous pouvez consulter ici
La justification de la hausse récente du taux directeur repose sur l’objectif gouvernemental de stabiliser l’inflation. Cependant, cette dernière persiste à croître, atteignant actuellement un taux alarmant de 27,2 %. Cette réalité soulève la question fondamentale des leçons à tirer de cette dynamique.
Répercussions sur l’emprunt et la stabilité économique
La hausse du taux directeur risque d’entraîner une réticence généralisée à l’emprunt, car elle élève le coût du crédit, freinant ainsi la demande de prêts et réduisant les dépenses de consommation et d’investissement. Cette situation pourrait également avoir un impact sur les Investissements Directs Étrangers (IDE) que le Burundi attirait déjà.
De plus, la production est susceptible de diminuer, étant donné que celle-ci dépend de la combinaison du capital et du travail. Dans les conditions actuelles, l’accès au capital devient difficile, ce qui a un impact direct sur le travail. Cette situation pourrait entraîner une réduction de la production, soulignant les défis actuels liés à l’accessibilité au capital dans notre contexte économique. D’après Thaddée Habyarimana, étudiant en Master à l’Université du Burundi.
La question cruciale demeure : cette course à la stabilisation de l’inflation trouvera-t-elle une fin ? Face à un taux d’inflation élevé, actuellement fixé à 27,2 %, aucune solution magique n’est envisageable. Cependant, une analyse plus approfondie permet d’esquisser quelques pistes. En examinant le cas du dollar américain, considéré comme la principale réserve de valeur mondiale, la plupart des banques centrales s’assignent des objectifs d’inflation, souvent fixés à 2 % par an. Actuellement, l’indice de prix à la consommation (CPI) du dollar américain dépasse cette cible, s’établissant à 3,1 % par an.
À titre d’illustration, l’étude de Josef Tětek dans son ouvrage “Bitcoin : Separation of Money and State”, menée à une époque où l’inflation aux États-Unis atteignait 5 %, met en lumière les conséquences dévastatrices d’un tel taux sur le pouvoir d’achat, volant un quart de celui-ci en 6 ans et le réduisant de moitié en 14 ans. Transposons cette réalité à l’inflation du franc burundais sur une période de 14 ans, et l’espoir semble mince, sans nécessité de calculs approfondis.
Conclusions et perspectives
La seule conclusion à laquelle nous pouvons parvenir est celle formulée par les économistes de l’école autrichienne depuis des années : le système de marché demeure le seul système concevable compatible avec une société prospère et civilisée. En d’autres termes, tout contrôle excessif, que ce soit au sein d’institutions financières ou dans divers secteurs de la vie nationale, est voué à l’échec. L’expérience montre que la politique monétaire n’échappe pas à cette réalité. Ainsi, de manière avisée, l’adoption progressive d’une monnaie décentralisée, comme le Bitcoin, pourrait constituer une solution pertinente face aux défis actuels.
Par BARAKANA GUY EUDES